Migrations: Nationalité et Candidature. Proposition des juristes et du groupe d’initiative « Réseau International Diaspora En Ligne ».
4 juin 2015Migrations: Nationalité et Candidature. Proposition des juristes et du groupe d’initiative « Réseau International Diaspora En Ligne ».
Dans un contexte où nos compatriotes bénéficient d’une intégration qui leur offre l’opportunité d’être élus maire ou député dans leur pays d’accueil, les binationaux sénégalais sont victimes d’une grande injustice dont nos compatriotes sont inconscients. Nés de pères immigrés en France, en Allemagne ou aux Etats-Unis, nous avons la nationalité sénégalaise que personne ne nous conteste. Arrivés au Sénégal nous prenons facilement le certificat de nationalité sénégalais bien que la plupart d’entre nous, nés de pères qui ont acquis la nationalité française pour des raisons dont certains tiennent des relations historiques entre le Sénégal et la France. Donc la plupart d’entre nous, nés en France de pères français avons la nationalité française d’origine et non d’acquisition par une demande quelconque. Nous avons deux nationalités d’origine.
Un Sénégalais de nationalité sénégalaise vit en France, travailleurs immigré ou sportif et, au regard des facilités offertes par la loi française. On ne lui demande pas, contrairement à Allemagne, de produire la preuve qu’il à renoncé à sa nationalité d’origine. La bi-nationalité, c’est autre chose. Le binational n’a rien demandé. Il est né en France de père ou de mère de nationalité française. Il est français par le jus sanguini en plus du jus soli ou droit du sol. Il est sénégalais d’origine parce que son père est sénégalais ; il est automatiquement sénégalais par le jus sangui ou droit du sang. Donc, du jour de sa naissance il a deux nationalités d’origine alors qu’il n’a rien demandé. Il est bi-national. La double nationalité et la bi-nationalité ne se traitent pas de la même façon.
Dans le premier cas l’individu a manifesté sa volonté d’acquérir une autre nationalité sans obligation de renoncer à la première. Dans le deuxième cas il subit les deux nationalités du fait de ses parents et de son lieu naissance. Ce sont deux nationalités qui s’imposent à lui. Si le service militaire est obligatoire dans les deux pays, il le fait dans les deux pays. C’est pourquoi un binational, suisse, belge, espagnole, ou sénégalais, à tout moment, peut renoncer à l’une de ses deux nationalités. Venons-en au Sénégal. L’inscription sur le code électoral sénégalais n’exige que la preuve de la nationalité sénégalaise, ce que tous les immigrés peuvent faire sans difficultés. La grande injustice dont nous souffrons par rapport à nos compatriotes restés au pays, c’est que le Code Electoral sénégalais exige que nous soyons, dès la candidature, de nationalité exclusivement sénégalaise. Il ne dit pas qu’il faut prouver qu’on a une seule nationalité, la sénégalaise. Car c’est une preuve impossible, puisqu’il y’a dans le monde autant de nationalités que de pays membres des Nations-Unies.
Par exemple, nous sommes donc obligés de renoncer à la nationalité belge, ce qui est un gros sacrifice qui aura des répercussions sur nos enfants vivant en Belgique et fréquentant les écoles et les universités françaises.
Comme tout le monde ne peut pas gagner les élections au mieux si un fils d’immigrés renonce à la nationalité belge et gagne les élections, tous les autres perdent définitivement cet avantage qui arrangeait tout le monde, le Gouvernement belge comme le Gouvernement sénégalais. Pour nous c’est donc un gros risque que d’être candidat à la Présidence au Sénégal.
Notre compatriote qui est resté au pays ne court aucun risque alors que cette législation constitue pour nous, un sérieux obstacle de dissuasion. Le moins qu’on puisse dire, c’est que c’est une discrimination antidémocratique, injuste. La solution ? On peut rédiger un article pour le binational.
Par exemple : Le binational peut, à raison de sa nationalité sénégalaise peut présenter sa candidature. Toutefois, s’il est élu, il ne pourra prêter serment et être installé Président que s’il renonce explicitement à sa deuxième nationalité. Mais il y’a plus simple : déplacer simplement le mot « exclusivement » de l’article 28. Voici la solution que nous proposent les juristes sur le cas des binationaux :
1-) On déplace la question de la nationalité exclusive de la candidature
(Article 28 de la constitution du 22 Janvier 2001) en y supprimant le mot « exclusivement »à l’article 37 sur l’installation :
2-)Article 37 : un premier alinéa ainsi conçu :
Pour être installé dans ses fonctions, le Président élu doit être de nationalité sénégalaise.
Le Président de la république est installé…
Le moment est venu, pour nos dirigeants de cesser de réduire les émigrés à une vache laitière qui ne sert qu’à transférer des fonds pour contribuer au développement du pays d’origine. Même s’il faut assumer cette exaltante mission ; nous souhaitons aller plus loin en mobilisant les compétences et les réseaux de migrants sur la définition d’une gouvernance qui intègre le segment des émigrés. A ce sujet, nous sommes engagés à mobiliser les députés, les autorités de l’exécutif, la société civile et les émigres. Notre processus démocratique doit davantage contribuer aux performances en matière d’élection pour consolider notre leadership africain.
PS : Voir la constitution du 22 Janvier 2001
- Article 28 : Tout candidat à la Présidence de la République doit être EXCLUSIVEMENT de nationalité sénégalaise, jouit de ses droits civils et politiques, être âgé de 35 ans au moins le jour du scrutin. Il doit savoir lire, et parler couramment la langue officielle.
Double nationalité (Belge)
Le droit international évolue et les lois nationales s´adaptent également aux mouvements de populations plus nomades. Bien sûr, la plupart des gens ne possèdent qu´une seule nationalité tout au long de leur vie mais de plus en plus de personnes ont deux voire même trois nationalités. Le point sur les lois belges. Une matière un peu ardue mais passionnante car si on lit entre les lignes, on devine cette lente évolution du droit qui s´adapte à une société de moins en moins homogène. Une seule nationalité Vous êtes né en Belgique et vos parents ne sont pas Belges : vous avez la même nationalité que vos parents, à moins que la loi du pays d´origine de vos parents n’en décide autrement. Si vos parents ne sont pas tous les deux de la même nationalité, à eux de choisir une des deux lors de la déclaration de naissance. En Belgique, un enfant est inscrit sous une seule nationalité, sauf si le ou les pays d´origine des parents reconnaissent l´enfant comme ressortissant.
Vous êtes né en Belgique de parents allochtones, vous obtenez la nationalité belge si un de vos parents est né en Belgique ou y a eu sa résidence principale durant cinq ans au cours des dix années précédant votre naissance. Si un de vos parents est né en Belgique et a la nationalité belge, vous avez alors automatiquement la nationalité belge, indépendamment du pays où vous êtes né(e). La double nationalité Vous recevez la double nationalité si la législation de l´autre pays concerné l´autorise. En tant qu´enfant, vous pouvez même avoir trois nationalités. C´est le cas si vous êtes né dans un pays qui applique le « droit du lieu de naissance » ou si vos parents ont deux nationalités différentes qui ne sont pas celles du pays dans lequel vous êtes né. Si vous avez plusieurs nationalités, dont la nationalité belge, les autorités belges vous considéreront exclusivement comme Belge.
Si vous émigrez en Belgique
En tant qu´étranger, vous pouvez acquérir la double nationalité si vous obtenez la nationalité belge tout en gardant votre nationalité d´origine, par exemple, par déclaration de nationalité ou par naturalisation. Ici aussi, c´est la législation du pays d´origine qui détermine si vous pouvez garder votre nationalité.
Si vous émigrez à l´étranger
La nouvelle loi relative à la double nationalité est d´application pour tous les Belges, depuis le 9 juin 2007. Elle stipule que vous conservez la nationalité belge lors d´une naturalisation, à moins que vous ne renonciez expressément à celle-ci. Si, par exemple, vous vous faites naturaliser Américain, vous restez Belge, à moins que vous ne renonciez à votre nationalité belge.
Rappel:
Au Sénégal, le Code autorise bel et bien la double nationalité.
Profitant du débat consécutif à la tenue du Discours de Politique Générale de Monsieur le Premier Ministre, d’aucuns ont cru utile de donner dans le hors sujet en soulevant, grossièrement avec intention de nuire, un pseudo débat sur la double nationalité au Sénégal, prétendant que le Code Sénégalais de la Nationalité interdisait la double nationalité. Que nenni ! Du coup, tout le monde et n’importe qui s’auto érige en expert pour tenter de nous confiner dans l’obscurantisme.
Si bien que l’on a pu entendre ou lire des contrevérités du style « Le Code sénégalais de la Nationalité n’autorise pas la double nationalité…Il empêche un Sénégalais d’avoir une autre nationalité » Idem à propos de l’Allemagne « …Aucun allemand ne peut avoir une nationalité, que ce soit de fait ou d’acquisition… » « …Les lois sur la nationalité sont des lois…exclusives » etc…
IL n’est pas possible de laisser prospérer des affirmations aussi fausses.
Au Sénégal, le Code autorise bel et bien la double nationalité.
« Devient de plein droit sénégalais, l’enfant mineur dont la mère veuve acquiert la nationalité sénégalaise.. » Quid s’il avait déjà acquis la nationalité étrangère de son père surtout si ce dernier ne l’a reconnu qu’après la mère ? Il devient, bien sûr binational et le demeure car le Code ne prévoit nulle disposition contraire dans ce cas
De même, voici un enfant né au Sénégal d’une mère sénégalaise. Il est sénégalais. Par la suite, durant sa minorité, son père étranger lui confère sa nationalité. Dès lors, il bénéficie de la double nationalité.
Un enfant naît à New –York de père et de mère sénégalais. Il est sénégalais et américain aussi (droit du sol).
Il a la double nationalité et la loi du Sénégal ne s’y oppose pas ; sans parler du cas où les deux parents seraient, eux-mêmes binationaux, l’enfant peut se retrouver avec quatre nationalités au moins. Le Sénégal n’y fait pas obstacle. Ces types de combinaisons sont légion dans l’application du Code et ouvrent à des situations de fait où le citoyen sénégalais a la double nationalité. L’on nous objectera : « ok pour les enfants mais nous on parle des adultes ». Le militaire sénégalais qui après avoir quitté le service actif acquiert une autre nationalité ne perd pas sa nationalité sénégalaise au moins durant quinze ans. Donc, pendant tout ce temps, il a la double nationalité.
Le Code date de Mars 1961 or le Sénégal est devenu indépendant en 1960. De Août 1960 (pour tenir compte de l’éclatement de la Fédération du Mali) à fin Février 1961, le Président de la République, le Président du Conseil (titre du PM de l’époque), celui de l’Assemblée Nationale, les Ministres et députés avaient tous une autre nationalité. Voilà pourquoi le Code avait été prévu dans les dispositions transitoires que : «…Les membres du Gouvernement du Sénégal, les députés à l’Assemblée Nationale et les membres des assemblées régionales ainsi que les conseillers municipaux… » Peuvent, sur simple déclaration, opter pour la nationalité sénégalaise.
En d’autres termes, il suffisait à ces officiels détenteurs de nationalité(s) étrangère(s) de faire une déclaration devant le juge de Paix ou le président du Tribunal de Dakar pour dire qu’ils optaient pour la nationalité sénégalaise et ils devenaient non seulement des nationaux mais des sénégalais au premier degré tout en conservant leurs anciennes nationalités. Voilà d’autres adultes à double nationalité. De manière expresse, La Loi leur a permis de conserver leur ancienne nationalité, notamment la française, en disposant que le nouveau Code auquel ils venaient de souscrire « …ne saurait avoir pour effet de porter atteinte …à leurs droits acquis sur le fondement de lois antérieures.. », notamment des lois Blaise Diagne (1916) sur les 4 Communes et Lamine Guèye (1946) conférant la nationalité française.
Disposant de la latitude de transmettre leurs premières nationalités à leur descendance, de nombreux sénégalais sont légalement et légitimement binationaux. Rappelons, (de mémoire) quelques termes de la loi (française) Blaise Diagne « …Sont et demeurent français, eux et leurs descendants, les natifs des quatre Communes… ». Encore une fois, tout en convenant de ce qui précède l’on nous répliquera que cela c’est du passé et que l’on parle des majeurs actuels qui acquièrent une autre nationalité. La meilleure réponse selon, nous c’est que le Code cinquantenaire est dépassé sur ce point comme sur de nombreux autres. Le Droit connaît bien ces lois surannées voire complétement dépassées, d’application ridicule ou improductive. C’est une des exceptions à la « dureté » de la Loi.
La disposition invoquée pouvait se comprendre dans un contexte d’indépendance nouvelle, une atmosphère de nationalisme, de construction de la nation etc…
Aujourd’hui à l’ère de la mondialisation, du brassage accéléré des populations, des déplacements et échanges intensifiés etc…, on est mal venu, au Sénégal, d’invoquer ce genre de disposition, socialement, dépassée. En effet, comment pouvons-nous nous faire les chantres de l’intégration africaine, avoir eu des compatriotes sénégalais qui ont siégé dans tous les parlements et gouvernements francophones et lusophones d’Afrique de l’Ouest et même parfois d’Afrique Centrale, rechercher activement à recourir à des binationaux pour nos équipes de Basket et de Football ou autres, organiser la naissance de nos enfants et petits-enfants dans certains pays à droit de sol, être de grands émigrants devant l’Eternel, solliciter les milliards de notre Diaspora qui fait entrer au Sénégal plus d’argent que l’aide publique au développement, être une terre de rencontre qui a intégré diverses peuplades dans notre pays, être, naturellement, des individus bilingues (au moins français /langue nationale) voire polyglottes, etc…et vouloir donner dans un faux débat d’un exclusivisme désuet et inapproprié aux exigences et à la vérité d’un monde moderne globalisé et surmédiatisé.
Le comble de cette affaire du candidat président de la République qui doit être « exclusivement » de nationalité sénégalaise. Impossible, oui, car nous savons pertinemment que Senghor et Wade étaient de double nationalité évidente tandis que des indications concrètes permettent de le dire de Diouf aussi. Aucun d’eux n’a trahi le Sénégal. Que dire de nos nombreux Chefs d’Etat-major Généraux franco-sénégalais ?
Conformément à ce qui avait été annoncé dans le Programme du Président Macky Sall, le Premier Ministre a annoncé une révision du Code en faveur des femmes donnant naissance à des enfants à l’étranger. Il ne faudra pas s’en limiter à cela, c’est tout le Code de la Nationalité qu’il faut refondre pour qu’il s’adapte aux réalités du 21ème siècle globalisé.
Maitre Serigne Babacar Guèye
Juriste spécialiste en Migrations Internationales
Membre du Groupe d’Etudes et de Recherches pour le Développement Régional
et Rural