Plus de 60 exilés libanais et syriens, en Méditerranée depuis dix jours, dérivent actuellement entre Malte et l’Italie. Trois enfants à bord seraient déjà décédés. Malte n’a pas encore autorisé d’opération de sauvetage.
Ils ont quitté Tripoli, au Liban, il y a 10 jours : entre 60 et 70 migrants libanais et syriens dérivent actuellement en mer Méditerranée, au large des côtes maltaises et italiennes. Par téléphone satellite, ils ont demandé l’aide des autorités maltaises. Trois enfants seraient déjà morts.
Les exilés ont épuisé leurs réserves d’eau, de nourriture et de lait maternisé depuis trois jours, selon des proches contactés par l’agence Associated Press. Malgré la présence de plusieurs navires commerciaux dans les alentours, Malte n’a pas encore autorisé d’opération de sauvetage.
Selon le frère de l’un des passagers syriens, le canot “conçu pour cinq passagers” prend l’eau et menace de chavirer. Les passagers écopent l’eau avec quelques seaux. « Les adultes peuvent supporter le froid et le manque de vivres, mais les enfants sont en grande difficulté », a-t-il déclaré à l’Associated Press.
« Chaque fois que j’appelle, on entend les enfants crier et pleurer », dit-il : « Je ne sais pas pourquoi aucun gouvernement n’a pris de mesures pour les secourir. Est-ce parce que ce sont des personnes pauvres qui essaient simplement de joindre les deux bouts pour leurs familles ? »
Le député libanais Ashraf Rifi a exhorté le gouvernement italien, “pays ami du Liban”, à prendre l’initiative de sauver ces passagers à la dérive.
Les autorités maltaises responsables
“Le bateau est actuellement dans la zone de recherche et de sauvetage maltaise, Malte est donc bien l’autorité responsable de la coordination d’une opération de secours”, indique à InfoMigrants un porte-parole de la plateforme téléphonique d’urgence Alarm Phone, alertée sur le cas de ce bateau depuis le samedi 3 septembre. Les familles ont perdu contact avec les passagers dans la nuit de lundi à mardi.
Selon Alarm Phone, plusieurs navires de commerce et porte-conteneurs sont passés à proximité du bateau de migrants, sans pour autant leur porter secours. “Le fait que Malte ne leur demande pas de procéder à un sauvetage ne dispense pas les navires marchands de leurs obligations de porter assistance à un bateau en détresse”, pointe le porte-parole.
Les départs du Liban se multiplient
Selon les familles, les passagers souhaitaient se rendre en Italie. La plupart sont originaires des provinces du nord du Liban, dévastées par l’effondrement de l’économie libanaise qui a entraîné plus des trois quarts de la population dans la pauvreté. Le Liban accueille par ailleurs plus d’un million de réfugiés venus de Syrie. Face à la crise, les départs de Libanais et de réfugiés syriens par la mer se multiplient.
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En une semaine, quatre autres bateaux partis du Liban ont pris contact avec Alarm Phone. Selon la plateforme, deux ont finalement été secourus par Malte, l’un est arrivé en Italie, et le dernier a été refoulé vers la Turquie par les garde-côtes grecs.
En avril, un bateau transportant environ 80 exilés libanais, syriens et palestiniens avait fait naufrage à plus de cinq kilomètres du port de Tripoli, à la suite d’une confrontation avec la marine libanaise. Le soir même du drame, sept corps avaient été retrouvés, dont celui d’une fillette, et 48 survivants avaient par ailleurs été repêchés. Trente personnes au total ont disparu, selon des estimations de la marine.
Les circonstances de ce naufrage, la plus grande tragédie migratoire au Liban depuis plusieurs années, prêtent à débats. Selon des survivants, l’embarcation avait été percutée par la marine libanaise. Les autorités, de leur côté, affirment que deux patrouilles avaient suivi le bateau surpeuplé pour le forcer à faire demi-tour mais que le canot de migrants avait tenté de leur échapper. Dans sa fuite, l’embarcation aurait heurté les navires de la marine.
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Le 26 août, un sous-marin a découvert les restes d’au moins sept personnes dans l’épave du naufrage, à 450 mètres de profondeur.
« L’une des toutes dernières images que nous avons prises, c’est celle de personnes bras dessus, bras dessous », avait indiqué le capitaine Scott Waters, qui avait piloté le sous-marin durant les opérations de recherche. “Elles sont mortes en se serrant l’une contre l‘autre. »