Bayonne, ville étape sur la route des migrants
5 juillet 2021Bayonne, dans le sud de la France, voit arriver quotidiennement des migrants venus d’Irun, ville frontalière espagnole située à une quarantaine de kilomètres. La plupart de ces exilés, pour beaucoup originaires d’Afrique subsaharienne, ne sont que de passage dans cette ville du Pays basque, avant de continuer leur route vers d’autres grandes villes françaises. Reportage.
Mohammed est à Bayonne depuis une semaine. Ce Guinéen de 31 ans est venu à la distribution de l’association Diakité ce dimanche de juin afin de récupérer un sac à dos et quelques affaires pour la suite de son voyage. Comme beaucoup, il ne veut pas s’installer dans cette ville du Pays basque, située à une quarantaine de kilomètre de la frontière espagnole.
Billet de car en poche, Mohammed espère monter dans un bus le lendemain et atteindre Paris, où l’attend son oncle.
Nouvelle route migratoire
Depuis trois ans, Bayonne est devenue une étape incontournable pour les migrants originaires d’Afrique subsaharienne, arrivés en Europe via l’Espagne. Durant cette période, la ville a vu passer plus de 25 000 exilés, selon les associations locales.
« Avant 2018, nous n’étions pas une route migratoire mais le durcissement des contrôles et des conditions de vie en Italie ont provoqué un changement de trajectoire », explique Lucie Bortayrou, de l’association Diakité. Si en 2018, les migrants arrivaient au Pays basque après avoir débarqué en bateau dans le sud de l’Espagne, ils viennent aujourd’hui des Canaries où plus de 20 000 personnes ont accosté l’an dernier.>
Le flux d’arrivées à Bayonne varie ces derniers mois au gré des mouvements depuis l’archipel espagnol vers le continent. Peu nombreux en fin d’année dernière, Madrid a accentué ces transferts au printemps pour libérer les hôtels où étaient logés les exilés, en vue de la saison touristique. Résultat : Bayonne a vu arriver de plus en plus de migrants dès le mois d’avril.
Mohammed n’échappe pas à la règle. Arrivé aux Canaries en janvier, il a été transféré à Madrid en mai et a continué sa route vers la France, en échappant à la vigilance des forces de l’ordre, déployées en nombre à la frontière franco-espagnole.
Centre Pausa, une « pause » sur la route des migrants
Pour gérer cet afflux migratoire, la mairie de Bayonne, avec l’aide d’associations locales – qui ont depuis quitté la structure suite à des différends avec les élus locaux – a ouvert, début 2019, un centre de transit appelé Pausa, situé près de la gare, le long de l’Adour.
D’une capacité initiale de 120 places, le site peut héberger le double en cas de besoin. En 2018, au plus fort de la crise migratoire dans le département, plus de 250 personnes ont été logées dans l’établissement.
Lors de notre visite, mardi 29 juin, une quarantaine de migrants étaient présents dans le centre Pausa, selon Philippe, le directeur, qui n’a pas souhaité que son nom de famille soit publié. Quelques semaines plus tôt, en avril, ils étaient une centaine. Les associations estiment qu’environ 500 personnes passent chaque mois par le centre.>
La structure n’a pas vocation à devenir un lieu d’hébergement pérenne mais fait office de « pause » dans le parcours migratoire des exilés. Pour cette raison, les migrants ne peuvent y rester que trois jours et « souvent quand une personne arrive dans la journée, elle repart le soir-même », précise Philippe.
Les conditions de vie spartiates à l’intérieur du centre n’encouragent de toute façon pas les migrants à s’y installer. Lits de camps, sanitaires et douches en nombre réduit, présence sporadique de personnels de santé, aide juridictionnelle quasi absente, horaires de sortie réglementées… sont autant de facteurs qui peuvent pousser vers la sortie.
Pour faciliter leur départ de Bayonne, et ainsi éviter qu’ils errent dans la région, le maire a fait déplacer la gare routière devant le centre Pausa. Les cars en direction d’autres grandes villes de France s’y arrêtent plusieurs fois par jour. C’est dans un de ces bus que Mohammed a pris place lundi. Le Guinéen a réussi à rejoindre Paris sans encombre où il déposera sa demande d’asile.L