Un groupe de 13 migrants, qui avaient tenté d’entrer dans l’enclave espagnole de Melilla le 24 juin dernier, a été condamné, mercredi, à deux ans et demi de prison ferme par un tribunal marocain. L’avocat des condamnés n’a pas été en mesure de préciser la nature des charges retenues.
Ils espéraient une vie meilleure en Espagne. Treize migrants africains, qui avaient tenté d’entrer de force dans l’enclave espagnole de Melilla, ont été condamnés, mercredi 17 août, par la justice marocaine à deux ans et demi de prison ferme, selon leur avocat Me Khalid Ameza.
Ce dernier, interrogé n’a pas été en mesure de préciser la nature des charges retenues contre ses clients.
« Des peines très sévères contre les demandeurs d’asile qui ne sont venus au Maroc que pour échapper à la guerre et aux persécutions », a réagi l’Association marocaine des droits humains (AMDH), qui précise que ces personnes sont originaires du Soudan, du Soudan du Sud et du Tchad.
Les condamnés ont comparu devant la chambre criminelle de première instance du tribunal de Nador, ville marocaine frontalière de l’enclave, au nord du Maroc. Ils ont l’intention de faire appel.
Ces personnes faisaient partie des 2 000 exilés qui ont tenté le 24 juin de s’introduire en force dans la cité espagnole, seule frontière terrestre de l’Union européenne (UE) en Afrique, avec Ceuta. Le drame avait fait 23 morts parmi les migrants, selon les autorités marocaines – 27, d’après l’AMDH -, provoquant une forte indignation au Maroc et à l’étranger.
Sur des images amateurs filmées ce jour-là, on pouvait voir des amoncellements de corps inertes gisant au sol, des visages de migrants en souffrance, et des coups de matraque distribués par des forces de l’ordre marocaines sur des hommes déjà à terre.
Quelques heures après les faits, l’ONU et l’Espagne avaient réclamé une enquête indépendante.
« Un jugement très sévère »
Suite à ce drame, le Maroc avait de son côté lancé une mission d’information. Conduite par le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), elle avait conclu à la mort par asphyxie des 23 victimes. Cette enquête terminée, le Maroc s’est empressé de porter les exilés devant la justice.
Le 19 juillet, le même tribunal à Nador a condamné 33 migrants africains à 11 mois de prison ferme chacun pour « entrée illégale » au Maroc, « violence contre agents de la force publique », « attroupement armé » et « refus d’obtempérer ». « Un jugement très sévère au regard des éléments du dossier et des circonstances des faits », avait souligné Me Khalid Ameza, faisant part, là aussi, de son intention de faire appel.
« On entendait beaucoup de cris, des cris de détresse » : Mamadou, témoin du drame de Melilla
Pour ces migrants condamnés – en majorité des Soudanais – le Maroc est un pays de transit sur la route qui les mène à l’Europe. En attendant de franchir la frontière espagnole, beaucoup survivent dans les forêts alentours de Gourougou près de la frontière avec Melilla et dans les bois alentours de Bekoya et de Lakhmis Akdim. Les conditions de vie y sont désastreuses, et les affrontements avec la police, réguliers.
Le 18 juin, soit quelques jours avant le drame de Melilla, des violences inédites par leur ampleur avaient d’ailleurs éclaté à cet endroit entre les autorités et les occupants.
Cinq jours plus tard, une opération de ratissage a été menée par la police dans la zone : 14 migrants ont été interpellés. Passés devant la justice le 4 août, ils ont écopé de huit mois de prison ferme pour « appartenance à une bande criminelle d’immigration clandestine » au Maroc, « outrage à des agents de la force publique pendant l’exercice de leur fonction » et « désobéissance ».
Omar Naji, membre de la section locale de l’AMDH, qui a assisté au procès, a exprimé son incompréhension à la suite du verdict. « Pourquoi condamner des migrants dont le seul tort était d’être réfugiés dans une forêt ? Ils n’ont pas tenté de traverser la frontière. »