Paris présente un ambitieux plan d’accueil des migrants
12 octobre 2015Paris présente un ambitieux plan d’accueil des migrants
Après des mois de tensions autour des campements insalubres regroupant des centaines de migrants dans le 18e arrondissement ou face à la gare d’Austerlitz, la Ville de Paris présente lundi 12 octobre « la mobilisation de la communauté de Paris pour l’accueil des réfugiés ».
Ce programme de dix-huit engagements organise un accueil des migrants plus large que la norme édictée par le ministre de l’intérieur. Alors que Bernard Cazeneuve, à l’instar des autorités européennes, ne manque pas de rappeler régulièrement que contrairement aux demandeurs d’asile, les migrants économiques « n’ont pas vocation à rester en France », le plan parisien préconise, lui, que « chaque fois que cela est possible, ces engagements concernent, au-delà des réfugiés, l’ensemble des migrants venus chercher refuge à Paris ».
La maire (PS) de Paris, Anne Hidalgo, met ainsi une nouvelle fois en avant un positionnement qui lui avait valu l’agacement du gouvernement avant l’été. Le 9 juin, Mme Hidalgo avait en effet proposé de créer à Paris des « centres de transit pour migrants ». Son idée avait été jugée politiquement dangereuse par un gouvernement inquiet de prêter le flanc aux accusations de laxisme en matière d’immigration. La maire de la capitale reprend aujourd’hui son idée, sous une forme moins ostentatoire. Le chef de l’Etat devait recevoir Mme Hidalgo lundi pour en discuter.
« Canaliser les énergies »
Au sortir d’un été marqué par les expulsions houleuses de campements dans le quartier de La Chapelle, la Ville de Paris a organisé, le 10 septembre, une grande réunion citoyenne réunissant 400 personnes qui avaient envie de s’investir. C’est là que la municipalité s’est emparée de la dynamique citoyenne qui a conduit à l’annonce de lundi. « Les Parisiens souhaitent vraiment s’engager. Il était de notre mission de canaliser les énergies, d’offrir nos compétences et nos infrastructures pour mieux organiser cet élan de solidarité », assume Dominique Versini, l’adjointe au maire en charge de la solidarité, de la famille et de la lutte contre l’exclusion. Depuis cette date, des rendez-vous multiples ont rythmé la vie de l’Hôtel de Ville, parce qu’« il a fallu faire le lien entre des gens qui proposaient de travailler ensemble avant que le souffle ne retombe », explique-t-elle.
Le plan présenté lundi matin associe des mesures très nouvelles et des décisions déjà annoncées, mais rappelées au sein d’un manifeste qui affirme l’esprit général qui gouverne l’équipe municipale. Ainsi, l’accueil de tous les mineurs isolés (sans avoir au préalable vérifié leur âge) devient la norme dans la capitale, comme l’accès de tous aux soins. Ce n’est encore qu’un grand principe, mais 250 consultations ont pu être offertes depuis le mois de juin à ceux qui en avaient le plus besoin.
Pour l’hébergement, la Ville a mobilisé huit nouveaux lieux depuis l’été. Comme ce n’est pas suffisant, la municipalité s’engage à chercher encore du bâti et du foncier pour installer plus de centres d’accueil, en respectant une solidarité entre arrondissement et en rêvant d’une répartition plus équitable avec les autres départements d’Ile-de-France.
« Effort substantiel »
Comme Anne Hidalgo le souhaite, une meilleure prise en charge des nouveaux arrivants, ceux qui débarquent sans repère et sans adresse dans une gare parisienne après avoir traversé toute l’Europe, sera organisée. Une équipe pluridisciplinaire est déjà mise en place pour assurer leur accueil et leur orientation vers des hébergements, afin d’éviter la recréation de campements. Un pool de traducteurs va aussi voir le jour en lien avec des étudiants de l’Institut national des langues et civilisations orientales et des associations.
En parallèle, les Parisiens qui accueillent chez eux des réfugiés seront aidés ; les cours de français langue étrangère seront augmentés et rendus plus visibles, comme le dispositif d’accompagnement à la création d’entreprise qui sera ouvert à cette population arrivante. Tout cela s’inscrit dans une liste d’engagements dont le coût, « d’un effort substantiel de plusieurs millions d’euros », sera inscrit au budget 2016.
Ces mesures s’appuient sur une pensée philosophique. Ainsi, le 18e et dernier engagement pris par la capitale s’intitule « Promouvoir la liberté mondiale de circulation ». Cette proposition vise à apporter un soutien à l’Organisation pour une citoyenneté universelle qui promeut un très symbolique passeport de citoyen du monde. Dans la même veine, Paris se propose d’accueillir une conférence internationale sur la liberté de circulation et d’installation des personnes, dans le cadre des travaux des Nations unies.
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