Résidence d’écriture : Miwa s’engage pour le Made in Sénégal
29 juillet 2015Résidence d’écriture : Miwa s’engage pour le Made in Sénégal
L’Association Made in west Africa (Miwa) a tenu le week-end dernier une résidence d’écriture pour l’élaboration d’un ouvrage collectif sur le Made in Sénégal. Chercheurs, professeurs, consultants et experts en tous genres se sont réunis durant deux jours pour une seule cause : la revalorisation du consommé local et du secteur agricole, premier levier de développement et gage de bonne santé.
Les effets néfastes de la mondialisation sont bien connus partout. Si les pays occidentaux ont su développer très tôt un protectionnisme commercial leur permettant de se prémunir d’éventuelles fluctuations du marché, tel n’est pas le cas pour les pays en développement dont le Sénégal. Dans ce pays, les pourcentages qui se dégagent de l’étude de l’économiste Ibrahima Bèye sont très parlants. «La seule importation du riz contribue à rendre la balance commerciale déficitaire à près de 16%», souligne-t-il.
Le Sénégal est enfermé depuis la colonisation dans le paradigme des importations à telle enseigne qu’il est devenu dépendant sur tous les points. Il est donc urgent selon l’enseignant chercheur Ibrahima Diallo, par ailleurs président de Miwa, d’inverser la tendance et de produire et de consommer ce que nous produisons. Selon ce dernier, acheter c’est voter. L’achat citoyen, même s’il coûte cher, doit être la posture à adopter. «Il faut nous approprier de nos produits et renverser l’image négative que nous avons de nos produits. Pourtant au Sénégal, nous avons beaucoup de produits sur lesquels nous sommes mieux cotés et mieux dotés. Pourquoi penser que tout ce qui nous vient de l’étranger est meilleur ? Pourquoi penser que le meilleur des Sénégalais est moins bon que le moins bon des Européens ?»
Sur une telle interrogation, l’historien trouve sans doute une réponse. Les années de colonisation ont fait que le Sénégalais a nourri ce complexe de l’Occident. Cela doublé d’une rationalisation des produits. Le système colonial a contribué à asseoir pour sa part cette dépendance en arrachant les agriculteurs de leurs cultures vivrières comme le mil, le maïs, le sorgho, le haricot… et en les remplaçant par les cultures industrielles comme l’arachide et le riz.
Pour une souveraineté alimentaire
L’autosuffisance en riz est l’une des questions qui a fait couler beaucoup d’encre. Le Président Macky Sall compte beaucoup sur le riz de la vallée. Il a ainsi fait de l’agriculture le premier axe du Plan Sénégal émergent (Pse). «Combien de millions ont été injectés dans ce secteur alors qu’on se retrouve toujours à l’état embryonnaire ?», demande le consultant Abdoul Rany Benjelloun. Pour M. Benjelloun, la souveraineté alimentaire passe par un nécessaire redressement du secteur agricole. «Il faut mettre en valeur toutes les terres arables abandonnées à elles-mêmes et rebelles à toutes cultures, revaloriser les terres marécageuses pour les plantes vivrières ou médicinales et réhabilité les terres salées.» L’exemple de polders hollandais en est la parfaite illustration du point de vue du consultant agricole. «Le Sénégal peut et doit s’en sortir. Même s’il y a quelque part un échec dans les politiques agricoles retournons vers la terre, c’est la seule matière d’émergence. Cultivons davantage nos produits locaux et consommons ce que nous produisons», préconise M. Benjelloun non sans rappeler le sort du cheval blanc de George Duhamel qui, dédaignant l’herbe fleurie du pré où il était attaché, tendit le cou à la haie voisine pour y cueillir à ses risques et périls une nourriture de qualité fort douteuse. Le Sénégalais serait-il comparable au cheval blanc ?
Alimentation saine pour une bonne santé
Depuis quelques années, la recrudescence de certaines maladies cardiovasculaires de même que les infections, le diabète, l’hypertension artérielle, le cancer… inquiète les médecins. Pour bon nombre, cela est dû à l’avènement des Ogm (organismes génétiquement modifiés), des pesticides et autres engrais en tous genres qui pullulent dans les fruits et légumes. Du point de vue de Dr Mohamed Jalloh, l’aliment est le premier médicament, mais souvent la qualité laisse à désirer. «Maintenant, on a assez à manger, mais on mange mal. Pourtant, nos fruits et légumes renferment à l’état naturel d’importantes vertus.»
A titre d’exemple, il cite le corossol qui a des effets anticancéreux, le gingembre qui est bien contre les troubles digestifs et le lait de chameau, un puissant antioxydant. Le professeur exhorte la population à manger saine. Les fast food sont pratiques et à coût réduit, mais il n’en demeure pas moins qu’ils ne sont pas bons pour la santé. Pourquoi d’ailleurs le Sénégal s’encombre de fast food et de plats venant d’ailleurs, alors qu’il regorge de puissants plats nutritifs. Il n’y a pas plus propre, plus juste et meilleurs pour la santé, dira Nazarena Lanza, l’agro-écologiste.
Le Quotidien