Éric Zemmour a présenté mardi 30 novembre sa candidature à l’Élysée pour, dit-il, « sauver la France de l’immigration ». Selon le polémiste, elle « n’est pas la cause de tous nos problèmes, même si elle les aggrave tous ». Une affirmation démentie par les dernières études économiques sur la question.
Pour les candidats extrémistes qui font du rejet de l’étranger un fonds de commerce électoral, les immigrés ont bon dos : ils prennent les emplois des nationaux, ils coûtent bien plus qu’ils ne rapportent, et comme ils seraient de plus en plus nombreux, les maux précédemment cités ne feraient qu’empirer. Trois idées archi-fausses, contredites par la réalité ou les études économiques réalisées pour les vérifier. Premier constat : la France, vieux pays d’immigration, qui a ouvert ses frontières aux travailleurs étrangers dès le XIXe siècle, n’est plus aujourd’hui un grand pays d’accueil. Les immigrés arrivés en 2020 représentent 0,4% de la population, deux fois moins qu’en Allemagne, deux fois moins que la moyenne de l’OCDE, le club des pays riches.
Si on compte tous les immigrés vivant sur le sol français, ils constituent environ 10% de la population. Est-ce dans la moyenne européenne ?
Le chiffre est même de 11,7% pour l’OCDE, qui considère comme immigrés tous ceux qui sont nés à l’étranger, y compris donc les Français nés à hors des frontières. Une proportion comparable à celle l’Espagne ou des Pays-Bas et inférieur à la moyenne des pays membres de l’OCDE. La proportion d’immigrés est, par exemple, plus forte en Allemagne, 16%, ou encore en Suède où 20% de la population est immigrée. Le fait migratoire français s’est donc fortement atténué. Toutes les études réalisées sur son coût économique parviennent à la même conclusion : il est quasiment nul, en France comme dans les autres pays riches. Quant à la situation de l’emploi, au moment où les pénuries de main-d’œuvre compromettent la reprise, on entend d’une même voix syndicats et patronat français réclamer plus d’immigration économique pour pallier les manques criants qui pénalisent la restauration ou le bâtiment. Car beaucoup d’activités sont délaissées par les nationaux : dans les emplois à domicile, quatre postes sur dix sont pourvus par des immigrés, trois sur dix dans le bâtiment, enfin plus d’un médecin sur dix est aussi d’origine étrangère.
Les immigrés sont-ils donc devenus indispensables à l’économie française ?
Oui. Et ils le seront de plus en plus. C’est vrai pour la France comme pour la plupart des autres pays occidentaux. L’immigration est une nécessité, une opportunité prônée récemment par les économistes du Conseil d’analyse économique, une instance indépendante rattachée au gouvernement. Pour les tâches souvent considérées comme ingrates et mal rémunérées et surtout pour favoriser l’innovation. Aux États-Unis, le quart des brevets est déposé par des immigrés. En Allemagne, c’est 13%, en France 8% seulement. L’Hexagone est toujours une destination de choix pour les étudiants étrangers, mais rien n’est fait pour retenir les talents. Ils viennent de moins en moins pour leur doctorat et ils repartent plus vite qu’ailleurs. La France regarde aujourd’hui non pas vers l’avenir mais dans son rétroviseur. Du fait de l’immigration encouragée jusque dans les années 1970, le quart des citoyens français ont au moins un parent étranger. Cette donnée renouvelle l’identité nationale, mais elle ne nous dit rien de son avenir.
D’autres pays européens font le choix de l’immigration, c’est le cas de nos voisins allemands.
D’abord poussés par l’urgence démographique. Ils vieillissent et font de moins en moins d’enfants. Le nouveau gouvernement de coalition a donc prévu, dans son programme, de faciliter l’immigration. Il veut, entre autres, favoriser l’intégration des étrangers en simplifiant l’accès à la double nationalité. Les conservateurs de la CDU, aujourd’hui dans l’opposition, font mine de trouver ce virage brutal, il correspond pourtant à une demande unanime de la société allemande, les seize ministres de l’intégration des Länder l’ont réclamé bien avant les élections.